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Le particularisme des donations entre époux


La question des donations entre époux mérite une attention particulière car il s’agit de donations particulières bénéficiant d’un régime dérogatoire favorable, en raison des liens qui unissent le donateur et le donataire. Les règles applicables aux donations entre époux et aux avantages matrimoniaux ont été profondément modifiées par la loi du 26 mai 2004, entrée en vigueur le 1er janvier 2005, laquelle dissocie les effets patrimoniaux du divorce de l’attribution des torts.

Deux questions se posent alors :

Les époux peuvent-ils révoquer les donations qu’ils se seraient consentis, en dehors de tout divorce ?

Pour les donations consenties avant l’entrée en vigueur de la loi de 2004, il convient d’appliquer le droit ancien. Dès lors, les donations par contrat de mariage sont irrévocables à raison de l’immutabilité des conventions matrimoniales (article 1396 alinéa 3 du Code civil). En revanche, les donations effectuées au cours de l’union sont toujours librement révocables (article 1096 ancien du Code civil).

Pour les donations consenties après le 1er janvier 2005, la loi du 26 mai 2004 a modifié l’article 1096 du Code civil et les donations effectuées au cours de l’union ne sont plus systématiquement révocables. L’article 1096 du Code civil dispose désormais que « La donation de biens à venir faite entre époux pendant le mariage sera toujours révocable. La donation de biens présents faite entre époux ne sera révocable que dans les conditions prévues par les articles 953 à 958 ».

L’abrogation de la révocabilité ne vise donc pas les donations de biens à venir consenties pendant le mariage, lesquelles restent librement révocables par l’époux qui les a consenties. Il s’agit des biens qui composeront le patrimoine du disposant à son décès (par exemple les donations au dernier vivant).

Concernant les donations de biens présents, la loi du 23 juin 2006 réformant les successions a apporté une modification à la loi de 2004. Cette dernière prévoyait que les donations de biens présents ne sont pas révocables (article 1096 alinéa 2 du Code civil). Depuis, il convient de distinguer suivant que la donation de biens présents prend effet au cours du mariage ou non.

Pour les donations de biens présents prenant effet au cours du mariage, l’article 1096 alinéa 2 du Code civil dispose que celles-ci sont irrévocables, comme pour les donations de droit commun. Pour les révoquer, il faudra recourir aux causes de révocation de droit commun des articles 953 à 958 du Code civil (notamment inexécution des conditions sous lesquelles la donation a été faite ou ingratitude résultant de l’atteinte à la vie du donateur). La révocation pour cause de survenance d’enfant du donateur est néanmoins exclue, seule différence par rapport au droit commun des donations (article 960 du Code civil).

Pour les donations de biens présents ne prenant pas effet au cours du mariage, elles restent révocables au cours du mariage par l’époux qui les a consenties. Il s’agit de l’hypothèse d’une donation d’un bien présent dans le patrimoine du donateur au moment de la donation, mais dont le transfert de propriété a été différé.

Le divorce a-t-il une incidence sur les donations consenties entre époux au cours du mariage ?

D’après les anciens articles 267 et 269 du Code civil, celui aux torts exclusifs de qui le divorce pour faute avait été prononcé ou qui avait pris l’initiative du divorce pour rupture de la vie commune perdait automatiquement toutes les donations et avantages que son conjoint lui avait consentis. Pour le divorce aux torts partagés, l’article 267-1 du Code civil disposait que chacun des époux pouvait révoquer tout ou partie des donations qu’il avait consentis à l’autre. Le divorce par consentement mutuel supposait, lui, une distinction. Pour le divorce sur demande conjointe, les époux décidaient eux-mêmes du sort des donations. En cas de divorce sur demande acceptée, l’article 268-1 du Code civil prévoyait que chaque époux pouvait révoquer ces donations. Le sort des donations et avantages matrimoniaux dépendait donc du type de divorce.

Depuis la loi de 2004, le principe est celui de la neutralité du divorce. Il n’y a plus lieu de distinguer selon le type de divorce, mais selon la nature de la donation (article 265 du Code civil).

Pour les donations de biens présents, les avantages matrimoniaux prenant effet au cours du mariage et les donations que les futurs époux se seraient consentis par contrat de mariage, la règle est désormais que le divorce est sans incidence sur ces libéralités et avantages qui sont donc maintenus (article 265 alinéa premier du Code civil). Il s’agit par exemple des apports à la communauté. En outre, la Cour de cassation a pu juger qu’une clause insérée dans le contrat de donation prévoyant la révocation de celle-ci en cas de divorce était nulle (Civ.1ère, 14 mars 2012, n° 11-13.791).

La solution diffère pour les donations de biens à venir, les dispositions à cause de mort (testament, legs) et les avantages matrimoniaux prenant effet à la dissolution du régime matrimonial, pour lesquels le divorce emporte révocation de plein droit. Toutefois, l’auteur de la donation de biens à venir ou de l’avantage matrimonial peut manifester sa volonté de la maintenir, cette volonté étant alors constatée au moment du divorce et rendant irrévocable la donation maintenue (article 265 alinéa 2 du Code civil).

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