Peut-on adopter un membre de sa famille ?
L’adoption au sein d’une même famille est admise en droit français. Toutefois, elle n’est pas automatique.
L’adoption intrafamiliale amène à une modification des liens familiaux et à un bouleversement de l'inscription généalogique de l'adopté. En effet, le nouveau lien créé par l'adoption vient se substituer (adoption plénière) ou s'ajouter (adoption simple) au lien familial préexistant entraînant un risque de confusion des générations
C’est pourquoi, dans le cas d’une adoption intrafamiliale, l’adoption simple est à privilégier par rapport à l’adoption plénière car elle ne crée pas de rupture totale avec la famille d’origine pour l’adopté.
Plusieurs situations d’adoption au sein d’une même famille peuvent se présenter:
[if !supportLists]1) [endif]L’adoption de l’enfant de son conjoint
L’adoption de l’enfant du conjoint est courante dans les familles recomposées. Il est possible d’adopter l’enfant de son conjoint sous la forme simple ou plénière peu importe la durée du mariage. Il est cependant nécessaire que dix ans séparent l’adopté de l’adoptant.
Cette adoption permet aux beaux-parents d’exercer une autorité parentale sur l’enfant du conjoint. L’exercice de cette autorité parentale demeure néanmoins conjointe; le parent par le sang de l’enfant en tant que conjoint de l’adoptant ne se voit pas supprimer ses droits parentaux. A l’inverse, cette adoption rompt tout lien juridique avec la famille de l'autre parent par le sang.
Cependant, l’adoption plénière de l’enfant du conjoint concerne uniquement 4 situations :
[if !supportLists]• [endif] le conjoint est l'unique parent inscrit sur l'acte de naissance de l’enfant
[if !supportLists]• [endif]L'autre parent de l'enfant s'est vu retirer l'autorité parentale
[if !supportLists]• [endif]L'autre parent de l'enfant est décédé et les parents du défunt sont eux-mêmes décédés ou se sont manifestement désintéressés de l’enfant
[if !supportLists]• [endif]L'enfant a déjà été adopté par votre conjoint en la forme plénière et n'a de filiation établie qu'à son égard
Si aucune de ces conditions n’est réunie, l’adoption simple est alors à choisir.
En effet, l’adoption simple de l’enfant du conjoint permet d’adopter l’enfant de son conjoint même si la filiation de cet enfant est établie à l’égard de ses père et mère. L’adoption simple ne rompt pas les liens de l'adopté avec les membres de sa famille biologique. Deux situations peuvent se présenter:
[if !supportLists]• [endif]soit l’enfant a une filiation établie à l'égard de ses 2 parents et la personne avec laquelle votre conjoint a eu l'enfant donne son consentement à l’adoption
[if !supportLists]• [endif]soit l’enfant a déjà été adopté par le conjoint, en la forme simple ou plénière.
2) L’adoption simple par un autre membre de la famille
Le législateur ne prohibe pas les adoptions au sein d’une même famille; un enfant peut être adopté par une personne avec laquelle il est déjà rattaché par un lien de parenté ou d’alliance tant que l’adoption projetée ne constitue pas pour « les parties un bouleversement anormal de l’ordre familial et aurait donc des effets plus négatifs que positifs » ( Cass, 1er civ, 8 juin 1999).
Cependant, les juges admettent avec prudence l’adoption intrafamiliale. En effet, ils privilégient l’intérêt de l’enfant quant à la procédure d’adoption en raison à la fois de la perturbation familiale que peut engendrer une telle procédure et du risque d’instrumentalisation de la procédure. La Cour d’appel a par exemple validé une adoption dans un arrêt du 10 février 1998, car elle a estimé que la requérante a toujours pris soin de son jeune frère, que des liens étroits les unissant, que l’adoption permettrait une situation successorale intéressante et qu’enfin les autres frères et sœurs ne montrent aucune opposition à cette procédure.
De même, l'adoption simple d'un enfant par ses grands-parents peut être prononcée si elle vient consacrer juridiquement un lien préexistant, de nature filiale, entre ceux-ci et l’enfant (CA, Paris, 22 mars 2001 et CA, Caen, 27 nov. 1997). Dans ces espèces, les parents s’étaient complètement désintéressés de leur l’enfant qui a été élevé par les grands parents. En conséquent, l’abandon par les parents a justifié la demande d’adoption.
Les juges du fond prennent donc en considération des circonstances particulières de nature à prouver l’intérêt réciproque à l’adoption car ils se montrent bien souvent hostiles à l’adoption d’un petit-enfant par ses grands-parents utilisée à des fins fiscales ou successorales.
Contrairement à l’adoption simple, l’adoption plénière remplace le lien de filiation existant entre l’adopté et sa famille d’origine par un nouveau lien entre l’adopté et sa famille d’accueil. Pour cette raison, l’adoption plénière intrafamiliale qui rompt les liens avec les parents d’origine est donc plus difficilement admise par les juges du fond. Des circonstances exceptionnelles doivent être également caractérisées. A titre d’exemple, les juges ont estimé dans un arrêt de la Cour d’appel de Besançon (CA, Besançon, 1er février 1994) qu’il était dans l’intérêt d’un enfant qui bénéficie, malgré la disparition tragique de sa mère, assassinée par son concubin, père de l’enfant, d’une vie familiale stable chez ses grands-parents de faire l’objet d’une adoption plénière par ces derniers; ; en effet, le risque de confusion dans son esprit entre ses grands-parents et sa mère n'existe pas puisqu'il a conscience qu'il vit avec ceux-ci et que sa mère est décédée.